Diébédo Francis Kéré a été déclaré lauréat du prix Pritzker d’architecture pour 2022. Son école primaire de Gando est un excellent exemple de son approche inspirée de la conception durable et a été créée en tenant compte du climat local.
Diébédo Francis Kéré a été déclaré lauréat 2022 du prix d’architecture Pritzker, la récompense la plus prestigieuse en architecture. Les juges ont souligné son approche ingénieuse de la durabilité, qui fait appel à des techniques passives comme la ventilation et l’éclairage naturels pour assurer le confort dans des conditions difficiles, ainsi que ses efforts pour améliorer les établissements d’enseignement dans son pays, le Burkina Faso, ailleurs en Afrique et au-delà.
Premier Africain à remporter le prix Pritzker, Diébédo Kéré a des origines modestes. Il est né dans un village reculé du Burkina Faso, en Afrique de l’Ouest, qui est l’un des pays les plus pauvres du monde. Fils aîné du chef du village, il a eu la chance d’être le premier de sa communauté à aller à l’école. L’architecte n’a jamais oublié l’expérience de devoir apprendre dans un bâtiment surpeuplé et chaud, sans ventilation ni lumière du jour, aux côtés de plus de 100 camarades de classe, et il s’est juré de construire un jour une meilleure école.
« J’ai grandi dans une communauté où il n’y avait pas de jardin d’enfants, mais où la communauté était votre famille », a expliqué Kéré. « Tout le monde prenait soin de vous et le village entier était votre terrain de jeu. Mes journées étaient remplies par la recherche de nourriture et d’eau, mais aussi par le fait d’être ensemble, de parler ensemble, de construire des maisons ensemble. Je me souviens de la pièce où ma grand-mère s’asseyait et racontait des histoires avec un peu de lumière, tandis que nous nous serrions les uns contre les autres et que sa voix à l’intérieur de la pièce nous enfermait, nous sommant de nous rapprocher et de former un endroit sûr. C’était mon premier sens de l’architecture ».
L’école primaire de Gando a été construite à partir de matériaux locaux et est conçue pour garder les élèves naturellement au frais sans avoir besoin de climatisation.
Après avoir poursuivi ses études et obtenu son diplôme d’architecte à Berlin – il partage encore aujourd’hui son temps entre l’Allemagne et sa ville natale – Kéré est finalement rentré chez lui pour tenir son vœu et construire une nouvelle école pour son village. Il a réuni l’argent en organisant des collectes de fonds au niveau international et a veillé à ce que des locaux soient embauchés et formés.
L’école, l’école primaire de Gando, est un bel exemple de son approche de l’architecture qui met l’accent sur les conditions locales. De l’argile d’origine locale a été utilisée pour fabriquer des briques qui contribuent à isoler le bâtiment et à maintenir l’air frais à l’intérieur, tandis qu’un grand toit en surplomb et surélevé assure une ventilation sans qu’il soit nécessaire d’utiliser la climatisation ou des ventilateurs. Son achèvement réussi a été suivi par des logements pour les enseignants, une extension et une bibliothèque dans les années suivantes, qui prennent tous superbement leur place dans le village.
L’école secondaire du Lycée Schorge au Burkina Faso met l’accent sur la ventilation passive, les espaces ouverts et aérés et l’utilisation de matériaux locaux.
D’autres projets éducatifs ont suivi. L’école secondaire du Lycée Schorge, également au Burkina Faso, s’appuie sur les principes de conception établis dans l’école primaire de Gando et se concentre une fois de plus sur des approches simples et sensées des conditions locales, telles que la ventilation passive, la création d’espaces aérés et l’utilisation de matériaux locaux.
L’école se compose de neuf modules disposés autour d’une cour centrale, protégeant l’espace du vent et de la poussière. Une façade secondaire faite de bois d’eucalyptus local entoure les salles de classe pour créer de multiples espaces ombragés, idéaux pour que les enfants puissent se retrouver, socialiser ou travailler. Les plafonds des salles de classe, quant à eux, sont faits de plâtre perforé et diffusent la lumière indirecte du soleil à l’intérieur sans réchauffer indûment l’intérieur.
L’Assemblée nationale du Burkina Faso a été chargée de remplacer l’ancien bâtiment, détruit lors d’un soulèvement politique.
Un autre point fort de la carrière est la conception de Kéré pour l’Assemblée nationale du Burkina Faso, qui a été commandée pour remplacer l’ancienne structure détruite lors du soulèvement burkinabè en 2014 et qui est malheureusement actuellement en suspens en raison de l’agitation politique intérieure.
À plus grande échelle et plus ambitieuse sur le plan architectural que son œuvre éducative, elle consistera en une forme générale étagée et pyramidale, et accueillera une salle d’assemblée de 127 personnes à l’intérieur, tout en encourageant les rassemblements informels sur son extérieur rempli de verdure. Il y aura également des marchés et des cours, et le projet fait partie d’un plan directeur paysager plus vaste.
L’étonnante conception en bois de l’Assemblée nationale du Bénin fait référence à la tradition ouest-africaine selon laquelle les gens se réunissent sous un arbre pour prendre des décisions communautaires.
« Depuis l’achèvement de l’école dans son village natal, Kéré a poursuivi l’éthique et la méthode consistant à travailler avec l’artisanat et les compétences locales pour élever non seulement la vie civique des petits villages, mais bientôt aussi les délibérations nationales dans les bâtiments législatifs », ont déclaré les juges du Pritzker. « C’est le cas de ses deux projets en cours pour l’Assemblée nationale du Bénin, en construction avancée, et pour l’Assemblée nationale du Burkina Faso, temporairement interrompue par la situation politique actuelle du pays ».
« Depuis que le monde a commencé à prêter attention au travail remarquable et à l’histoire de la vie de Francis Kéré, il a servi de phare singulier en architecture. Il nous a montré comment l’architecture d’aujourd’hui peut refléter et servir les besoins, y compris les besoins esthétiques, des peuples du monde entier. Il nous a montré comment la localité devient une possibilité universelle. Dans un monde en crise, au milieu de valeurs et de générations en mutation, il nous rappelle ce qui a été, et continuera sans aucun doute à être, la pierre angulaire de la pratique architecturale : un sens de la communauté et de la qualité narrative, qu’il est lui-même si capable de raconter avec compassion et fierté. En cela, il fournit un récit dans lequel l’architecture peut devenir une source de bonheur et de joie continus et durables. »
https://www.pritzkerprize.com/laureates/diebedo-francis-kere
