Découvert il y a plus de 100 ans, le phosphore noir a été rapidement oublié car il n’y avait pas d’usage apparent. Dans ce qui peut s’avérer être l’un des plus grands comebacks historiques de l’ingénierie électrique, il joue aujourd’hui un rôle crucial pour l’avenir des appareils électroniques et optoélectroniques.
Grâce à la récente découverte d’une équipe de recherche, le matériau pourrait éventuellement remplacer le silicium en tant que matériau primaire pour l’électronique. La recherche de l’équipe, dirigée par Fengnian Xia, professeur agrégé en ingénierie et sciences de Barney L. Weller de Yale, est publiée dans la revue Nature Communications le 19 avril.
Avec le silicium en tant que semi-conducteur, la quête pour des dispositifs électroniques de plus en plus petits pourrait bientôt atteindre sa limite. Avec une épaisseur de seulement quelques couches atomiques, cependant, le phosphore noir pourrait inaugurer une nouvelle génération d’appareils plus petits, des composants électroniques flexibles et des transistors plus rapides, disent les chercheurs.
Cela est dû à deux propriétés clés. L’une d’elles est que le phosphore noir a une mobilité plus élevée que le silicium, c’est-à-dire la vitesse à laquelle il peut supporter une charge électrique. L’autre est qu’il a une bande interdite (bandgap), ce qui donne au matériau, la possibilité d’agir comme un commutateur. Il peut s’allumer et s’éteindre en présence d’un champ électrique et agir comme un semi-conducteur. Le graphène, un autre matériau qui a généré un grand intérêt ces dernières années, a une mobilité très élevée, mais il n’a pas de bande interdite.
Cependant, trouver un moyen de contrôler la bande interdite du phosphore noir est essentiel pour réaliser ses applications potentielles. À cette fin, les chercheurs ont découvert que la «bandgap» du matériau est plus contrôlable à une certaine épaisseur. En appliquant un champ électrique vertical sur le matériau à cette épaisseur, les chercheurs peuvent « syntoniser » la bandgap, réduisant essentiellement l’écart modéré au point où il se ferme presque.
Cela ouvre de nombreuses applications potentielles pour le phosphore noir, telles que les outils d’imagerie, les dispositifs de vision nocturne, les modulateurs optiques infrarouges moyens, les outils de spectroscopie sur puce et d’autres technologies optoélectroniques.
« Avant cette étude, la bande interdite du phosphore noir ne pouvait pas être réglé dynamiquement, limitant ses applications en optoélectronique », a déclaré Bingchen Deng, auteur principal de l’étude et étudiant doctorant dans le laboratoire de Fengnian Xia.
Trouver l’épaisseur optimale a nécessité des essais et des erreurs. « Au début, nous avons essayé un échantillon de 4 nanomètres d’épaisseur, et nous avons constaté que la mise au point de la bande interdite n’était pas très prononcée », a déclaré Bingchen Deng.
Ce dernier a également noté qu’avoir une bande interdite qui peut être contrôlée signifie que le phosphore noir pourrait être utilisé comme isolant topologique, un matériau ayant la capacité inhabituelle de servir à la fois comme isolant (à l’intérieur du matériau) et comme conducteur (sur sa surface) . Les chercheurs s’intéressent particulièrement aux isolateurs topologiques, car ils pourraient être essentiels pour développer une électronique à faible puissance, dans laquelle les électrons à la surface ne souffrent pas de diffusion.
http://news.yale.edu/2017/04/19/once-forgotten-element-holds-promise-future-electronics